Une plus grande visibilité égale moins de sécurité : les organisations faîtières LGBT constatent une augmentation de 50 % des signalements de crimes de haine anti-LGBTQ en 2021

À l’occasion de l’IDAHOBIT, la journée internationale contre l’hostilité envers les personnes LGBTI, l’Organisation suisse des lesbiennes (LOS), Transgender Network Switzerland (TGNS) et Pink Cross publient aujourd’hui un nouveau rapport sur les crimes de haine.

Communiqué de presse du 17 mai 2022

À l’occasion de l’IDAHOBIT, la journée internationale contre l’hostilité envers les personnes LGBTI, l’Organisation suisse des lesbiennes (LOS), Transgender Network Switzerland (TGNS) et Pink Cross publient aujourd’hui un nouveau rapport sur les crimes de haine. Ce qu’il montre : la votation sur le « mariage civil pour toutes et tous » a apporté plus de visibilité aux personnes lesbiennes, bisexuelles et gays, mais pas plus de sécurité pour la communauté queer. En 2021, la LGBT+ Helpline a enregistré 92 cas de crimes de haine anti-LGBTQ, soit 50 % de plus que l’année précédente. Le phénomène est particulièrement frappant pour les crimes de haine transphobes, qui ont très fortement augmenté en comparaison des dernières années. Et pourtant, le rapport sur les crimes de haine n’est que la pointe de l’iceberg. La revendication des organisations faîtières LGBT pour un recensement des cas au niveau national est plus actuelle que jamais.

Depuis l’année 2016, les crimes de haine anti-LGBTQ peuvent être signalés à la LGBT+ Helpline. Cette antenne de signalement a pour but de rendre visible et mesurable la situation en Suisse, car un recensement officiel n’a toujours pas été organisé sur l’ensemble du territoire. En ville de Zurich et dans le canton de Fribourg, les actes de violence sont recensés par l’État au niveau régional depuis 2021. Roman Heggli, secrétaire général de Pink Cross, constate en comparant ces données avec celles de la LGBT+ Helpline : « Le nombre de cas non recensés est encore très élevé, non seulement dans les endroits où la communauté est plus visible, comme la ville de Zurich, mais aussi à la campagne. Seul un système national de recensement peut garantir des données représentatives. C’est une revendication politique que les associations faîtières LGBT formulent depuis des années. »
 
Presque deux crimes de haine par semaine : en 2021 aussi, les organisations faîtières LGBT ont observé une tendance à la hausse des crimes de haine anti-LGBTQ. Sur les 92 cas recensés, près de la moitié ont eu lieu durant les quatre mois de la campagne de votations pour le « mariage pour toutes et tous ». Les allié‑es hétérosexuel‑les qui se sont engagé‑es en faveur du « oui » ont également été touché‑es. Par ailleurs, l’augmentation des signalements effectués par des personnes trans (32 %, dont 14 % de personnes non binaires) est particulièrement frappante. 45 % des personnes touchées pensent avoir été discriminées en raison de leur expression de genre. En outre, beaucoup de signalements sont effectués par des jeunes : en 2021, il y a un pic très clair de signalements de la part de personnes de moins de 22 ans.
 
Plus de la moitié des personnes touchées ont affirmé avoir eu des séquelles psychologiques. Ces expériences ont un effet intimidant sur l’ensemble de la communauté, comme l’explique Muriel Waeger, co-directrice de la LOS : « Beaucoup de personnes LGBTQ ont peur d’être agressées dans l’espace public. » Les actes de violence signalés ont surtout eu lieu dans l’espace public, et la plupart du temps, les passant-es n’ont pas réagi. Très peu de crimes de haine font l’objet d’une plainte, et à peine 20% des cas ont été dénoncés à la police. « La communauté devrait pouvoir faire appel à des services et des institutions professionnelles et dignes de confiance, et recevoir l’aide de personnes formées et sensibilisées. Ce n’est actuellement pas le cas », dit Muriel Waeger.
 
Alecs Recher, qui dirige le conseil juridique de TGNS, dresse un bilan : « C’est pour ces raisons que cette année, à l’occasion de l’IDAHOBIT (journée mondiale contre l’homophobie, la biphobie, l’interphobie et la transphobie), les associations faîtières LGBT considèrent qu’il y a un grand besoin d’agir au niveau politique et social, pour que les personnes LGBTQ puissent mener une vie plus sûre et plus autonome en Suisse. Nous demandons donc instamment au Parlement national de traiter et d’adopter le postulat pour un plan d’action national contre l’hostilité anti-LGBTQ lors de cette session d’été. En ce qui concerne spécifiquement la transphobie, une étude approfondie doit être menée par la Confédération afin que des mesures d’action efficaces puissent être prises. » De plus, les associations faîtières LGBT appellent la population à faire preuve de plus de courage civique lorsqu’elle observe des comportements hostiles envers les personnes LGBT.

Télécharger le rapport 2022 sur les crimes de haines

Communiqué de presse du 17 mai 2022

 

 

Rapport 2022 - l'essentiel en bref

Depuis 2016, les crimes de haine anti-LGBTQ peuvent être signalés à la « LGBT+ Helpline ». Ce service a pour but de rendre visible et mesurable la situation en Suisse, car un recensement officiel n’a toujours pas été organisé sur l’ensemble du territoire. L’analyse des cas qui ont été signalés à la LGBT+ Helpline entre janvier et décembre 2021 montre une réalité très préoccupante :

  • Avec un total de 92 crimes de haine, le nombre de cas a augmenté de 50 % par rapport à l’année précédente. Cela représente presque deux signalements par semaine.
  • Au cours de la campagne pour le « mariage civil pour toutes et tous » (de juin à septembre 2021), 44 cas ont été signalés. Ce sont donc près de la moitié des crimes de haine de l’année 2021 qui ont été signalés pendant ces quatre mois.
  • Environ 80 % des personnes ayant fait un signalement ont été injuriées ou insultées, tandis qu’environ 30 % ont subi des violences physiques. Après une diminution de la violence physique en 2020 (18 % des signalements), ce pourcentage a de nouveau atteint le niveau des années précédentes. 12 % des personnes touchées ont signalé des blessures résultant de l’agression.
  • Le pourcentage de signalements effectués par des personnes trans (32 %, dont 14 % de personnes non binaires) a fortement augmenté. 45 % des personnes ayant fait un signalement ont déclaré avoir été discriminées en raison de leur expression de genre.
  • Très peu de crimes de haines font l’objet d’une plainte : de tous les crimes de haine signalés à la LGBT+ Helpline, seuls 20 % ont été dénoncés à la police. La plupart des personnes qui ont porté plainte ont rapporté une réaction objective de la part de la police.
  • En 2021 aussi, la majorité des crimes de haine ont eu lieu dans les espaces publics. La plupart du temps, les passant-es n’ont pas réagi.
  • Les jeunes sont les plus touché e x s. En effet, en 2021, il y a un pic très clair de signalements de la part de personnes de moins de 22 ans.
  • Plus de la moitié des personnes touchées ont affirmé avoir eu des séquelles psychologiques. Cela peut avoir pour conséquence que les personnes LGBTQ n’osent plus apparaître comme telles dans la rue.

La comparaison avec les premiers recensements effectués par l’État montre que le nombre de cas non recensés est énorme. Il faut partir du principe que le nombre réel de crimes de haine est bien plus élevé.

La politique et la société civile ne doivent plus détourner le regard

Depuis des années, les chiffres parlent d’eux-mêmes : l’hostilité envers les personnes LGBTQ est constante et largement répandue. Les crimes de haine anti-LGBTQ sont une réalité quotidienne et ont des conséquences graves, non seulement pour les victimes directes, mais aussi pour l’ensemble de la communauté queer.

Le Parlement est maintenant appelé à adopter un plan d’action national contre les crimes de haine anti-LGBTQ afin de permettre des mesures coordonnées et efficaces à tous les niveaux de l’État.

Mais en dehors de la politique, la société civile est également concernée : jusqu’à présent, la plupart des crimes de haine ont lieu sans que personne n’intervienne ; cela doit changer. Les associations faîtières LGBT appellent la population à intervenir dans la mesure de ses possibilités en cas d’agressions contre des personnes LGBTQ et à faire preuve de courage civique !

Il n’y a qu’ainsi que la situation pourra s’améliorer à l’avenir, pour que les lesbiennes, les gays, les personnes bisexuelles, trans et queer puissent vivre sans crainte et sans discrimination.